Une chronique de Claude Luezior
Patrick HELLIN, Terres levées, sept 2023, 73 pages, éditions Traversées, ISBN : 978-2-931077-06-1
Itinérance entre espoir et désespérance où saigne le Verbe de papier :
Je survole mes déserts de papier
J’y pose une trace puis je m’enfuis
Le jour bientôt en efface le voile
Les vestiges ne vivent que la nuit
Ivresse de la solitude où luisent encore les plaies d’une enfance apparemment enfouie mais tragiquement présente.
Langue de druide, serrée, implacable, langue de poète qui parle aux miroirs, au gui, à la clarté mais aussi à l’obscur message des lunes :
J’abreuve mes lèvres
de rondeurs lumineuses
Et mes pensées nues s’éparpillent
dans un parfum d’infini
La parole, nécessaire mais insuffisante pour cicatriser le manque, se fait incantation onirique.
À la réflexion, l’ultime sentence de la quatrième de couverture me semble résumer parfaitement « le dedans et le dehors » de ce recueil prenant: une poésie des confins et de la fin des choses, lucide et désenchantée mais puissamment vivante, à boire jusqu’à la lie du temps qui reste, l’amour comme seul onguent face à la mort. Beau !
Hellin laboure la glaise des mots, lève les terres où frissonnent encore des printemps en jachère, casse le gel de la syntaxe, lutte, s’enfonce, renaît au gré des ombres. Mais rien n’y fait, un vide sublime et mortifère se canalise autour de l’être :
Le ciel est un creux que les mots ne peuvent combler
Et finalement, alors que l’on se met à espérer :
Tout chemin est chemin d’abîme
(…)
Les étoiles elles-mêmes
Abandonnent leurs lueurs
À l’immobile absence
Vraiment ?